Mesdames et messieurs,
Le rappel que vient de faire le ministre Abimbola, d’une partie de notre histoire commune incarnée par Bio Guéra (paix à son âme) me paraît tout aussi exaltant que frustrant.
Exaltant car, oser affronter un envahisseur aussi puissamment armé pour préserver sa liberté, sa dignité, protéger sa communauté, son patrimoine et son territoire au prix certain de sa vie, relève d’un héroïsme qu’habituellement les peuples célèbrent sans cesse quand l’un des leurs en est l’auteur.
Or, la narration, l’appropriation et la valorisation de notre histoire commune par nous-mêmes, notamment des faits aussi glorieux que ceux accomplis par Bio Guéra, n’est pas notre fort, et c’est cela mesdames et messieurs, mes chers compatriotes qui me frustre.
Nous ne célébrons pas assez ce qui est élogieux en nous et qui, chez les autres, suffit pour susciter de la fierté en soi et en sa communauté.
La caricature que nous faisons de nous-mêmes, ce que nous chantons quotidiennement et transmettons de génération en génération, c’est ce qui est négatif, ce qui relève des travers humains de manière générale mais que nous, nous attribuons exclusivement à nous-mêmes au point de les baptiser parfois de « béninoiserie ».
Mes chers compatriotes, il est temps de nous débarrasser de ce faux complexe qui nous isole, nous divise, nous fait avoir peur les uns des autres, nous inhibe et nourrit notre sous-développement.
Il est temps de nous découvrir nous-mêmes, de découvrir et de valoriser ce qui est grand en nous. Mes chers compatriotes, ces choses-là, ce qui est admirable en chacun de nous, ce n’est pas ce qui manque.
Il est temps de nous révéler à nous-mêmes, puis de révéler aux autres ce que nous avons de bien et de grand.
Il est temps d’être conscients et fiers de ce que nous sommes le Bénin, la fusion aboutie de ces anciens grands royaumes et peuples que sont les baatonu, berba, wassangari, yorouba, fon, adja, goun, waama, batammariba, yom, peulh et bien d’autres, les uns aussi méritants que les autres.
Nous convaincre qu’à l’instar de toutes les grandes nations constituées, les heurs et les malheurs ne sont pas un obstacle à l’unité, à la grandeur et au partage des valeurs.
Moi, je suis conscient que je suis un Bio Guéra, je suis conscient que chacun de nous est un Bio Guéra ou devra l’être pour défendre notre dignité, notre identité, notre histoire et nous protéger les uns les autres, protéger notre nation et œuvrer à son développement.
Mesdames et messieurs,
Cette belle statue de Bio Guéra sera pour nous, le reflet quotidien de notre grandeur, celle de nos aïeuls, celle de nos parents, celle de nous-mêmes et celle des générations à venir.
Mon exhortation est une prise de conscience parce que le Peuple béninois est un Peuple exceptionnel mais qui s’ignore. Notre génération a le devoir de mettre un terme à cela et de sonner enfin ce signal qu’un Peuple, un grand Peuple de l’Ouest africain, désormais fera parler de lui. Et nous avons commencé petitement mais de manière certaine.
Je rêve et je demande au Ciel de m’accorder un peu longue vie et bonne santé pour que mes yeux voient bientôt que le Bénin est effectivement une grande nation. Je rêve de cela. En fait, c’est une façon modeste de dire que je rêve de cela.
Chers Présidents, mes chers aînés,
Mesdames et messieurs du Commandement, de l’Exécutif, du Parlement, mes chers compatriotes, Béninois frères et sœurs, le Bénin vaut bien cette certitude.
Vive le Bénin.