A l’occasion de la transmission et de l’étude du projet de loi portant sur la révision de la Constitution du 11 décembre 1990

Béninoises, Béninois,

Mes chers compatriotes,

Il y a un an, lors de la campagne électorale et à mon entrée en fonction, je me suis engagé publiquement à opérer les réformes politiques et institutionnelles sans lesquelles, l’aspiration légitime de notre peuple à la prospérité, serait indéfiniment compromise.

Ces engagements, je les ai pris devant chacune et chacun d’entre vous, et je suis persuadé qu’ils ont contribué, pour une grande part, à la confiance que vous m’avez accordée.

L’éthique de la parole donnée, le respect des engagements pris devant le peuple, font partie intégrante des valeurs démocratiques et de la bonne gouvernance.

Respecter les engagements solennellement pris devant le peuple, c’est respecter le peuple.

Mes chers compatriotes,

C’est pourquoi, dès la formation de mon Gouvernement, j’ai mis en place une commission nationale chargée d’examiner la pertinence et la faisabilité des orientations et propositions contenues dans mon projet de société.

La composition de cette commission, où ont siégé les diverses sensibilités politiques, les sommités universitaires, les forces sociales et morales de notre pays, témoigne de la volonté de mon Gouvernement d’associer à la réflexion, l’éventail le plus large des courants d’opinion.

Je tiens ici à rendre un hommage mérité à tous les membres de ladite commission ainsi qu’à toutes les forces morales, politiques, sociales et culturelles que j’ai consultées de diverses manières, et qui ont, en groupes larges ou restreints, participé à des échanges, écouté nos motivations et nos justifications et enrichi le débat de leurs précieuses appréciations et contributions.

C’est donc un processus inclusif qui a conduit à l’élaboration du projet.

Mes chers compatriotes,

Le débat sur les mérites ou les défauts d’une Constitution, sur la nécessité de l’abolir ou pas, de réviser ou pas telle ou telle de ses dispositions, est un débat sans fin, chaque jour enrichi de nouveaux arguments, chaque jour relancé par des franges d’opinions nouvelles.

Il en est ainsi dans notre pays, comme dans toutes les démocraties du monde et cela doit être perçu comme un signe de vitalité, un signe de bonne santé démocratique. Je m’en réjouis et je nous en félicite.

Arrive, cependant, un moment où il faut arbitrer, opérer des choix en ayant à l’esprit que ce moment doit être une période de sérénité, d’accalmie politique et donc éloigné des échéances électorales, pour que la réforme n’encoure pas la critique d’une révision opportuniste.

A ce propos, le projet que j’ai soumis au Parlement, n’est constitué que de deux articles, et suggère sans ambiguïté en son article 2 ce qui suit :

« La présente loi constitutionnelle ne constitue pas l’établissement d’une nouvelle Constitution et n’emporte pas l’entrée en vigueur d’une nouvelle République. Elle entre en vigueur dès sa promulgation et sera exécutée comme loi de l’Etat. »

Cette clarification vise à rassurer de la portée objective du projet et de son dessein de ne servir que la cause de notre Patrie.

Mes chers compatriotes,

C’est tout cela qui me fonde à proposer un mandat présidentiel unique, à proposer le couplage des élections législatives avec les élections des collectivités territoriales, notamment communales.

Ce sont aussi les avis émis par les uns et les autres et cette expérience partagée avec vous, qui me fondent à proposer la restructuration de notre Cour constitutionnelle et de notre Haute Cour de Justice, pour asseoir dans notre pays, une véritable culture de la responsabilité et de la reddition de comptes par les dirigeants politiques.

Ce sont encore ces avis et cette expérience partagée avec vous, qui me fondent à vouloir le regroupement et la réduction du nombre des partis politiques, grâce en particulier au financement public de leurs activités, toute chose qui permettrait par ailleurs de mettre un frein à leur dépendance vis-à-vis des puissances d’argent.

Ce sont enfin ces avis et l’expérience partagée avec vous, qui me fondent à proposer une discrimination positive en faveur des femmes, pour promouvoir leur accès aux instances de décision, à l’échelle nationale comme à l’échelle locale, où nous savons qu’elles jouent un rôle déterminant.

Mes chers compatriotes,

Aussi ambitieux qu’il soit, le projet de révision de la Constitution reste perfectible. C’est animé de cette conviction, et m’appuyant sur les dispositions des articles 154, 155 et156 de la Constitution, que j’ai saisi l’Assemblée nationale pour son examen en session extraordinaire.

L’Assemblée nationale a fait droit à ma demande et a décidé de se réunir à compter de demain, vendredi 24 mars.

Durant cette session, elle étudiera le projet, débattra et délibérera, conformément à ses prérogatives constitutionnelles et dans le respect de son Règlement intérieur. Je veux ainsi dire qu’elle étudiera le projet en toute liberté et en toute souveraineté.

Ainsi, de même que mon rôle fut d’opérer des choix, de même le sien sera d’apprécier ces choix, de répondre aux questions que chacun d’entre nous est fondé à se poser : les modifications proposées renforcent-elles la démocratie ? Préservent-elles nos libertés ? Permettent-elles une meilleure reddition de comptes ? Organisent-elles mieux la vie politique ? Favorisent-elles le développement économique et social ainsi que l’épanouissement individuel et collectif ?

Chaque fois que la réponse à l’une de ces questions sera négative, pour l’une quelconque des propositions de modification, celle-ci pourra être rejetée.

Béninoises, Béninois,

Mes chers compatriotes,

L’histoire du monde enseigne que les nations qui surmontent les défis du développement et de la modernité, sont celles dont les leaders recherchent constamment les solutions qui dépassent les conservatismes et les clivages habituels, qui se projettent dans le temps et créent de meilleures conditions d’existence pour les générations à venir.

Les débats actuels font monter à l’entendement de tous, les appréhensions et les inquiétudes de chacun. Je les entends et les comprends parfaitement.

Pour autant, faut-il se satisfaire de l’apparente stabilité du moment et renoncer à une consolidation durable de nos institutions et de notre Etat ?

Pour ma part, j’ai inscrit mon mandat dans une perspective de transition qualitative qui donne à construire davantage la Nation, davantage l’Etat, davantage la démocratie, et davantage la bonne gouvernance.

Tout ceci, pour engager réellement la transformation pertinente de notre modèle politique.

Ce sont, dans le fond, les objectifs du projet que j’ai transmis à l’Assemblée nationale, et pour lequel je souhaite une réponse favorable. Ceci, dans l’espoir que les réformes promises et dont le Peuple m’a chargé depuis le 6 avril 2016, continueront de se mettre en place en respect du choix souverain de ce même peuple.

Vive le Bénin !

Je vous remercie.

Patrice TALON

Président de la République

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